Ça paraît bizarre comme ça, mais je vais vous le dire quand même : cet hiver, place à la mauvaise haleine ! Vous verrez, vos poumons vous diront « merci ». Lisez plutôt…
Pour avoir une image des poumons, il suffit de penser à un bel arbre avec son tronc imposant, ses branches principales qui fournissent la charpente et qui se divisent en branches de plus en plus petites.
Au bout des branchettes, visionnez de belles feuilles vertes, pleines de vitalité. Ces feuilles échangent oxygène et CO2 avec l’air ambiant. Maintenant, prenez cet arbre et retournez-le de telle manière que les feuilles pointent vers le bas. Le tronc est votre trachée. Les branches sont vos bronches, les branchettes vos bronchioles et les feuilles vos alvéoles pulmonaires. Tout ce réseau interconnecté vous permet d’échanger les gaz nécessaires à la vie.
Échanges gazeux
Les alvéoles pulmonaires sont de petits sacs dans lesquels aboutit le réseau des bronches. Ils sont irrigués par des veinules et artérioles. Le CO2 est rejeté depuis les veinules vers les alvéoles et l’oxygène de l’air contenu dans les alvéoles est absorbé dans les artérioles. Ces mécanismes se font à chaque seconde, sans que nous nous en apercevions : c’est la respiration. Cet échange constant rythme notre vie, depuis la première inspiration, le premier cri du bébé qui reflète sa vitalité jusqu’au dernier souffle qui termine notre vie terrestre.
Afin de protéger la muqueuse fragile des alvéoles, les bronches sécrètent en permanence du mucus qui contient des substances antibactériennes. Les bronches sont aussi tapissées de cils qui, avec l’aide du mucus, sont capables de capturer les déchets et de les remonter à la surface grâce à des mouvements réguliers. Cela nous permet d’expectorer poussières et résidus provenant de l’air extérieur, et déchets immunitaires provenant de l’environnement intérieur.
La respiration est le processus mécanique responsable du remplissage des poumons d’air « propre » (inspiration, chargée en oxygène) et de l’évacuation d’air «sale » (expiration, chargée en CO2). Le mouvement se fait grâce au diaphragme et est orchestré par le système nerveux autonome : la respiration se déroule sans que nous en ayons conscience. C’est un acte automatique, piloté par un système nerveux qui est, dans le contexte de la vie moderne, en proie au stress chronique.
Rôle du stress chronique
Le stress, au travers de l’activité du système nerveux sympathique, assèche les poumons. En effet, le stress est fait pour monopoliser nos ressources en cas de danger imminent. Lorsque notre vie est en danger, les poumons doivent être capables d’absorber l’oxygène et rejeter le CO2 d’une manière accélérée. Pour ce faire, la surface de contact avec l’air doit être augmentée. Cela s’effectue au travers d’une dilatation des bronches. Le mucus protecteur s’assèche plus vite. Les poumons sont moins bien protégés et plus susceptibles à l’infection.
Le stress provoque-t-il une bronchite ? Non, pas directement. Mais le stress abaisse l’efficacité de notre système immunitaire, assèche nos poumons et notre bouche, et rend donc notre système respiratoire plus vulnérable aux attaques. C’est définitivement un facteur aggravant, tout comme le manque de sommeil.
Si vous avez tendance à faire des bronchites à répétition pendant l’hiver, il faut agir tôt dans la saison afin de mettre en place un protocole de protection des poumons qui inclue des plantes et des compléments alimentaires.
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La vitamine D
Elle est essentielle pour un bon fonctionnement du système immunitaire, et aujourd’hui, nombre d’entre nous en sont déficients. Nous n’en fabriquons pas assez car, premièrement, nous ne nous exposons plus assez au soleil, et deuxièmement nous vivons sous des latitudes qui ne permettent pas à notre peau de capter suffisamment de soleil en hiver. Mais ce n’est pas notre cas dans le Sud.
Les autorités françaises recommandent des taux supérieurs à 30 ng/ml. Les autorités américaines, grâce aux recherches du « Vitamin D Council », recommandent 50 ng/ml comme taux idéal.
Le seul moyen de contrôler votre taux est de pratiquer un test sanguin avant l’hiver, autour de fin octobre, pour voir où vous en êtes. Si une supplémentation est nécessaire, autant commencer tôt. Il faudra aussi vérifier si cette supplémentation est assez dosée en refaisant une prise de sang en milieu d’hiver, vers la fin janvier.
Il est très rare aujourd’hui d’être en excès de vitamine D, mais ceci peut arriver. La seule manière de gérer la supplémentation est donc d’utiliser le test sanguin.
Une fois que vous connaissez les doses journalières nécessaires pour vous maintenir à un bon niveau, vous pourrez les appliquer chaque hiver. La prise de 1 000 à 3 000 UI de vitamine D3 par jour en hiver permettrait de se situer autour de 35 ng/mL pour la majorité de la population .
Le thym
Le thym (Thymus vulgaris) est l’un des meilleurs protecteurs des poumons que nous ayons dans notre pharmacie familiale. Mais nombre de personnes le dénigrent, pensant que cette herbe culinaire ne peut pas avoir de pouvoirs médicinaux bien intéressants. C’est faux.
Pour la prévention, buvez une infusion de thym le matin et le soir, tous les jours pendant les périodes à risque qui peuvent durer tout l’hiver. Si vous notez de petites brûlures d’estomac ou autre irritation gastro-intestinale, diminuez à une infusion par jour, ou faites une pause pendant une semaine.
L’infusion de thym
- Placez au fond d’une tasse une cuillère à café de feuilles de thym sèches, ou quelques branchettes de thym frais.
- Faites bouillir de l’eau dans une bouilloire, puis laissez-là reposer une ou deux minutes.
- Versez ensuite l’eau chaude dans la tasse et couvrez immédiatement à l’aide d’une assiette.
- Ne laissez pas trop infuser les feuilles, en particulier si la tasse contient aussi des branchettes, sous peine de donner à l’infusion un goût amer et astringent. Les huiles essentielles sont extraites très rapidement par l’eau chaude.
- Laissez infuser 2 à 3 minutes, puis filtrez.
Rajoutez, si vous le désirez, un peu de miel qui fournira un effet désinfectant supplémentaire, et buvez bien chaud. Si vous avez la chance de trouver du thym autour de chez vous, utilisez les nouvelles pousses qui apparaissent en janvier et février. Elles sont purement aromatiques et ne contiennent quasiment pas de tanins et de composants amers.
Les constituants du thym (Thymus vulgaris) ont une grande affinité pour la sphère pulmonaire. Après ingestion, ces huiles passent en circulation générale et se retrouvent excrétées par les alvéoles pulmonaires. Dans les alvéoles, ces huiles vont effectuer un travail des plus intéressants. D’abord, elles vont faciliter la production d’un mucus de qualité et vont aussi agir comme antibactérien et désinfectant.
La prise de thym journalière est donc une assurance contre l’infection.
Pensez en particulier au thym lorsque les personnes autour de vous commencent à tomber malade.
L’ail
Comme pour le thym, les principes aromatiques de l’ail ont une affinité pour les poumons. La preuve en est la fameuse haleine à l’ail ! Car cette odeur puissante qui complique les interactions
sociales ne provient pas de la bouche, mais des poumons. Les huiles sont libérées au niveau des bronches, et c’est pour cela que simplement mâcher un chewing-gum à la menthe est souvent d’un effet très limité.
Consommez une gousse d’ail frais deux fois par jour. Achetez une râpe micro-plane pour râper l’ail très finement, il sera plus facile à ingérer. Râpez la gousse, étalez-la sur une assiette, et laissez-la reposer à l’air libre pendant 10 minutes. Cela permet à l’ail de libérer un maximum d’allicine, l’un des composants actifs, grâce au contact avec l’air. Incorporez ensuite l’ail directement dans la nourriture ou dans de l’huile d’olive pour accompagner vos plats. Vous pouvez aussi l’incorporer à une cuillère à café de miel et l’avaler directement.
Si vous ne pouvez pas prendre l’ail deux fois par jour, prenez-le une fois le soir. Le lendemain matin, votre haleine devrait être quasiment normale. Si une gousse entière est trop difficile à avaler ou digérer, prenez une demi-gousse.
Infection
Si vous sentez que les poumons commencent à être atteints et qu’une bronchite pointe à l’horizon, il faut agir vite.
Prenez de l’échinacée pour stimuler les fonctions immunitaires.
Au début de la bronchite, les poumons vont être enflammés mais encore relativement secs. La phase de production de mucus n’a pas encore commencé. La toux est sèche et inflammatoire. Elle irrite la gorge. Elle peut être perturbatrice chez l’enfant qui a du mal à la calmer, amenant des nuits souvent agitées. Dans cette phase, le but est de calmer l’inflammation excessive et d’adoucir la gorge.
Echinacée pendant les infections
Pendant une infection et afin de stimuler le système immunitaire rapidement, l’échinacée doit se prendre à intervalles réguliers pendant la journée.
La forme idéale est l’alcoolature. La forme glycérinée peut aussi être utilisée pour ceux qui veulent éviter l’alcool.
Pour un adulte, prenez une cuillère à café d’échinacée dans un peu d’eau toutes les 3 heures, pour une prise totale de 5 cuillères à café pour jour. Maintenez ce rythme jusqu’à la fin de l’infection. Notez bien que si elle est sous-dosée, l’échinacée ne sera pas efficace.
L’Agence européenne du médicament considère comme « bien établi » l’usage de l’échinacée dans la prévention et le traitement des infections hivernales. Elle recommande d’en réserver l’usage aux adultes et aux enfants de plus de 12 ans. Pour un enfant de plus de 12 ans, vous pouvez effectuer une simple règle de trois afin de calculer les doses : multipliez la dose adulte par le poids de l’enfant en kilos, puis divisez par 70. Pour un enfant de 30 à 40 kg, utilisez une demi cuillère à café.
Préparez une grande tasse (300 ml d’eau) de l’infusion suivante, 2 fois par jour :
1 cuillère à soupe de feuilles de plantain lancéolé (Plantago lanceolata)
1 cuillère à soupe de fleurs de bouillon-blanc (Verbascum thapsus)
1 cuillère à café de racines de réglisse (Glycyrrhiza glabra)
1 cuillère à café de thym.
Laissez infuser à couvert pendant 10 minutes, filtrez et buvez une ou deux gorgée de temps en temps, chaud ou froid.
Si vous utilisez la feuille de bouillon-blanc et non la fleur, il faudra passer l’infusion dans un filtre à café non blanchi, car les poils de la feuille peuvent être irritants pour la gorge (ce qui serait bien évidemment contre-productif).
Dès que vous sentez que la toux devient productive, basculez sur des plantes ayant une action désinfectante pour les bronches et mucolytique (qui liquéfie le mucus). En effet, vos poumons vont commencer à produire une grande quantité de mucus. Il faut s’assurer qu’il reste fluide et qu’il soit expectoré efficacement. Sinon, le mucus a tendance à s’épaissir et est de plus en plus difficile à expulser, réduisant le diamètre effectif des bronches et rendant la respiration difficile.
Dans cette phase, la plante nous fournissant l’action la plus intéressante est la grande aunée, ou Inula helenium.
Si vous êtes chez vous, faites la préparation suivante, 3 fois par jour :
placez un demi litre d’eau froide dans une casserole.
Rajoutez 2 cuillères à soupe de racine de grande aunée et 1 cuillère à café de racines de réglisse.
Faites chauffer doucement à couvert. Une fois que l’eau frémit, baissez le gaz et laissez frémir pendant 10 minutes, toujours à couvert.
Coupez le gaz, soulevez le couvercle et rajoutez 1 cuillère à café de thym dans le liquide chaud.
Replacez le couvercle et laissez reposer 10 minutes. Filtrez et buvez chaud.
Si vous êtes au travail, préparez cette décoction le matin dans un litre d’eau (4 cuillères à soupe de racines de grande aunée, 2 cuillères à café de racines de réglisse, et 2 cuillères à café de thym).
Placez-la dans un thermos, et buvez-en une petite tasse régulièrement pendant la journée.
La grande aunée à La rescousse des poumons
La grande aunée est l’une des plantes les plus utiles pour gérer une infection pulmonaire. Cette grande plante aux fleurs jaunes ressemblant à des soleils nous fournit une racine à la fois aromatique et amère.
Les composants aromatiques ont une action désinfectante et mucolytique. Les composants amers, eux, ont une action tonique sur le système digestif. La combinaison des deux rend la plante particulièrement intéressante pour les bronchites.
Mais en quoi une stimulation du système digestif s’avère-t-elle utile ?
En général, une bronchite amène une production copieuse de mucus dont une partie va être avalée d’une manière involontaire, en particulier pendant la nuit. Les composants amers de la grande aunée vont favoriser la digestion de ces mucus pour ne pas qu’ils surchargent le système digestif et amènent un état quasi-nauséeux chez la personne.
Les expectorantes stimulantes
Il existe de nombreuses plantes expectorantes. Certaines sont classifiées comme « expectorantes stimulantes », c’est-à-dire qu’elles accentuent le réflexe de toux afin d’expulser le mucus. Ces plantes contiennent en général des saponines, qui sont à l’origine de cette stimulation. Comme le disait le fameux phytothérapeute allemand Rudolf Weiss, ce serait une erreur que de prendre ces plantes pendant la phase aiguë d’une bronchite, car elles pourraient créer une sur-stimulation du réflexe de toux et aggraver l’inflammation.
Par contre, vers la fin de l’infection, les poumons sont parfois épuisés et ont du mal à évacuer le mucus qui commence à s’épaissir. C’est à ce moment-là qu’il faut faire appel aux expectorantes stimulantes afin d’éviter une rechute.
Buvez l’une des deux préparations suivantes 2 à 3 fois par jour :
• La primevère officinale (Primula veris), qui possède une racine aromatique et expectorante. En décoction, vous pouvez prendre 1 cuillère à café de racines pour une tasse. Laissez décocter à feu doux pendant 5 minutes puis laissez reposer encore 10 minutes avant de passer et de boire.
• La saponaire (Saponaria officinalis), longtemps considérée comme l’expectorant stimulant le plus efficace, est un peu moins agréable à boire que la primevère, mais tout aussi efficace si ce n’est plus. Décoctez une demi cuillère à café de racines pour une tasse, laissez frémir à couvert pendant 5 minutes puis laissez reposer encore 10 minutes avant de passer et de boire. Attention, si vous la laissez reposer trop longtemps, elle peut provoquer des sécheresses de la bouche.
• Le marrube (Marrubium vulgare), qui est très difficile à boire en infusion, doit plutôt être préparé en sirop.
Les bienfaits du miel
Quelles que soient les préparations chaudes que vous allez vous concocter pendant l’hiver, n’oubliez pas de rajouter un peu de miel. Le miel a un pouvoir adoucissant et désinfectant indéniable, et va souvent rendre la boisson plus agréable à boire, en particulier lorsqu’il faut prendre les préparations pendant des jours d’affilée.
Précautions
Si vous voyez que les plantes n’arrivent pas à enrayer votre bronchite, n’attendez pas et allez consulter un médecin. La réglisse ne doit pas être prise d’une manière prolongée si vous souffrez d’hypertension essentielle. Elle ne devrait pas poser de problèmes si vous la prenez d’une manière ponctuelle et dans les doses recommandées dans cet article.
Dans le doute, faites vérifier votre tension artérielle dans une pharmacie.
À retenir
Premièrement, pour un programme de prévention efficace, il faudra agir très tôt dans la saison, dès le début des jours froids. Il faut préparer les poumons avant l’arrivée des premières toux dans votre entourage. Pensez à acheter les plantes à l’avance.
Deuxièmement, pour gérer les infections d’une manière efficace, il faudra agir fréquemment dans la journée, idéalement toutes les deux à trois heures.
Faites des prises rapprochées, quitte à diviser une grande tasse de préparation en plusieurs petites tasses. Il est aussi fortement conseillé de continuer le protocole pendant une semaine après la résolution de l’infection.
Troisièmement, une infection pulmonaire passe par différentes phases.
Une phase sèche et inflammatoire, puis une phase productive, puis parfois une phase d’épaississement des mucus avec difficulté pour expectorer. C’est cette dernière phase qu’il faut en particulier bien gérer pour éviter la rechute, en utilisant les plantes expectorantes stimulantes.
Résumé du protocole contre la bronchite
Phase | Protocole |
Prévention | Vitamine D, thym et ail |
Phase inflammatoire non productive | Echinacée + infusion de plantain lancéolé, fleurs de bouillon-blanc, réglisse, thym |
Phase productive | Echinacée + décoction de grande aunée, réglisse, thym |
Phase d’épaississement du mucus | Echinacée + décoction de primevère ou saponaire |
Et pour finir, rappelez-vous de l’importance de la période de convalescence pour se remettre sur pied. Repartir au travail alors que la bronchite n’est pas résolue complètement introduit un risque significatif de rechute. Le repos reste indéniablement la partie la plus importante du programme !
Christophe Bernard
Herbaliste et Naturopathe